Le livre 010101 (1971-2015)

Le web booste l’internet

Du bas débit au haut débit

Dans les années 1990, se connecter à l’internet est moins facile en Europe qu’en Amérique du Nord, et beaucoup plus cher. La connexion est d'abord tarifée à la durée, avec un tarif de jour élevé et un tarif de nuit plus économique, d’où l’obligation de travailler la nuit pour éviter les factures trop élevées. Des mouvements de grève sont d’ailleurs lancés fin 1998 et début 1999 en France, en Italie et en Allemagne, dans le but de faire pression sur les sociétés prestataires pour qu'elles baissent leurs prix et qu'elles proposent des forfaits internet, avec gain de cause dans les mois qui suivent. Mais la bande passante de l’époque ne permet pas une consultation rapide, surtout pour les images. Certains parlent même de World Wait Web («wait» signifiant «attendre» en anglais) au lieu de World Wide Web.

Quelques années plus tard, le haut débit se généralise avec la DSL (Digital Subcriber Line), le câble, la fibre, la WiFi (Wireless Fidelity) et la WIMAX (Worldwide Interoperability for Microwave Access). Jean-Paul, webmestre du site hypermédia Cotres.net, résume la situation en janvier 2007: «J’ai l’impression que nous vivons une période "flottante", entre les temps héroïques, où il s’agissait d’avancer en attendant que la technologie nous rattrape, et le futur, où le très haut débit va libérer les forces qui commencent à bouger, pour l’instant dans les seuls jeux.»

Henri «Henk» Slettenhaar, spécialiste des systèmes de communication, a vécu toutes les étapes de l’internet lors d’une longue carrière à Genève et en Californie. En 1958, Henk rejoint le CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) à Genève pour travailler sur le premier ordinateur numérique et participer au développement des premiers réseaux numériques. Son expérience californienne débute quant à elle en 1966 lorsqu’il rejoint pendant dix-huit mois une équipe du SLAC (Stanford Linear Accelerator Center – Centre d’accélérateur linéaire de Stanford) pour créer un numérisateur de film. De retour au SLAC en 1983, il conçoit un système numérique de contrôle qui sera utilisé pendant dix ans. Henk est ensuite professeur en technologies des communications à la Webster University de Genève pendant vingt-cinq ans et travaille également en tant que consultant auprès de plusieurs organisations internationales. En 1992, il crée la Silicon Valley Association (SVA), une association suisse qui organise des voyages d'étude dans la Silicon Valley et dans d’autres pôles de haute technologie. En 2000, il dirige leTelecom Management Program de la Webster University.

Henk raconte en décembre 1998: «Je ne peux pas imaginer ma vie professionnelle sans l'internet. Cela fait vingt ans que j'utilise le courrier électronique. Les premières années, c'était le plus souvent pour communiquer avec mes collègues dans un secteur géographique très limité. Depuis l'explosion de l'internet et l'avènement du web, je communique principalement par courriel, mes conférences sont en grande partie sur le web et mes cours ont tous un prolongement sur le web. En ce qui concerne les visites que j'organise dans la Silicon Valley, toutes les informations sont disponibles sur le web, et je ne pourrais pas organiser ces visites sans utiliser l'internet. De plus, l'internet est pour moi une fantastique base de données disponible en quelques clics de souris.»

Quoi de neuf en août 2000? «L'explosion de la technologie du mobile. Le téléphone mobile est devenu pour beaucoup de gens, moi y compris, le moyen de communication personnel vous permettant d'être joignable à tout moment où que vous soyiez. Toutefois l'internet mobile est encore du domaine du rêve. Les nouveaux services offerts par les téléphones GSM [Global System for Mobile Communications] sont extrêmement primitifs et très chers, si bien que le WAP [Wireless Application Protocol] a reçu le sobriquet de "Wait And Pay".»

Quoi de neuf en juillet 2001? «Ce qui me vient à l'esprit est le changement considérable apporté par le fait que j'ai maintenant une connexion à débit rapide chez moi. Le fait d'être constamment connecté est totalement différent du fait de se connecter de temps à autre par la ligne téléphonique. Je reçois maintenant mes messages dès leur arrivée dans ma messagerie. Je peux écouter mes stations radio préférées où qu'elles soient dans le monde. Je peux écouter les actualités quand je veux. Et aussi écouter la musique que j'aime à longueur de journée. (…) La seule chose qui manque est une vidéo de bonne qualité en temps réel. La largeur de bande est encore insuffisante pour cela. Mon domicile est maintenant équipé d'un réseau local avec et sans fil. Je peux utiliser mon ordinateur portable partout à l'intérieur et à l'extérieur de la maison, et même chez les voisins, tout en restant connecté. La même technologie me permet maintenant d'utiliser la carte de réseau local sans fil de mon ordinateur lorsque je voyage. Par exemple, lors de mon dernier voyage à Stockholm, je pouvais être connecté à l’internet à l'hôtel, au centre de conférences, à l'aéroport et même au pub irlandais!»

Dix ans plus tard, en juin 2011, Henk, désormais retraité, raconte: «Je suis devenu un "serial entrepreneur" actuellement en train de créer une start-up dans le domaine de la mobilité. J'utilise l'internet tout le temps pour trouver des partenaires et des idées. Nous utilisons également des livres en ligne pour apprendre l'art de l'innovation!»

Comment l’infrastructure de l’internet va-t-elle évoluer? D’après Rafi Haladjian, fondateur de la société Ozone, prestataire de technologies WiFi et WIMAX, l’internet pourrait devenir un réseau pervasif permettant de se connecter en tout lieu et à tout moment sur tout type d’appareil à travers un réseau unique et omniprésent. Il explique en 2007 sur le site web d’Ozone: «La nouvelle vague touchera notre monde physique, notre environnement réel, notre vie quotidienne dans tous les instants. Nous n’accéderons plus au réseau, nous l’habiterons. Les composantes futures de ce réseau (parties filiaires, parties non filiaires, opérateurs) seront transparentes à l’utilisateur final. Il sera toujours ouvert, assurant une permanence de la connexion en tout lieu. Il sera également agnostique en terme d’application(s), puisque fondé sur les protocoles mêmes de l’internet.»

Table des matières